Claude Monet
(1840 - 1926)
Date : 1892 | Technique : Huile sur toile
Monet peint le portail de la cathédrale de Rouen lors de deux campagnes en 1892 et en 1893, à chaque fois de février à la mi-avril. 28 toiles sont déclinées sur le motif avec lenteur, exigence et anxiété de la part de l’artiste : « Crébleu ! Quel travail que cette cathédrale ! C’est terrible ! » écrit-il à sa femme Alice restée à Giverny.
Le portail vu de face, harmonie brune est peint à partir d’un premier atelier au nord de la place. Dans une mise en page frontale, la façade sature la toile dans un parti pris décliné à travers toute la série. Les deux autres ateliers plus au sud généreront des vues obliques et une mise en place plus dynamique.
La volumétrie de l’édifice est relativisée jusqu’à ramener la silhouette de la flèche néogothique dans la continuité du portail central. Monet compose le motif grâce aux puissants rythmes de l’architecture mais son intérêt majeur pour la lumière rend la façade évanescente. Ce parti pris s’accentue dans les versions qui suivront.
L’harmonie des tons sourds, gris, ocre et bruns laisse apparaître, dans une observation de près, une richesse de pointes de couleurs des plus vives. Cette lumière objective et frémissante laisse place, dans la suite de la série, à des recherches colorées qui inscrivent Monet dans la subjectivité des postimpressionnistes.
Cette troisième série de sa carrière systématise son intérêt pour l’étude des lumières sur un même motif. Monet dépasse l’éphémère cher aux impressionnistes pour une appropriation unitaire du Temps que signale la date de 1894 apposée sur 20 des toiles, reprises en atelier, et leur exposition commune en 1895.