Odilon Redon partage la fascination pour le vitrail de Stéphane Mallarmé qu’il appelait  ce « vitrage d’ostensoir ». Le thème de la fenêtre, avant même qu’elle ne soit vitrail, est récurrent dans les « noirs » de Redon. Dès 1894, alors qu’il est encore dans l’univers de ses fusains,  il dessine un intérieur d’église avec une fenêtre grillagée à la lumière rayonnante. Le passage du noir à la couleur est pour l’artiste le moyen d’aller plus loin encore dans l’imaginaire. La place du vitrail dans cette évolution est remarquable. La fenêtre mystique, ouverture vers l’ailleurs, sera aussi l’élément libérateur, apportant avec elle la lumière de la couleur. Dans la première décennie du XXe siècle, Redon multiplie les références à l’architecture mystique : pas moins d’une quinzaine d’œuvres représentent un vitrail et une vingtaine d’autres montrent un visage sur fond d’arcatures ou d’ogive. A propos de cette œuvre, Redon écrit en 1908 : « C’est la représentation d’une espèce de baie gothique d’où émerge et semble choir on ne sait où une avalanche de fruits et de fleurs mêlés à des nuées blanches. Sur le côté, sont deux êtres étranges sans aucune proportion avec les fleurs et les fruits. L’un de ces êtres porte deux ailes à peine indiquées […] L’autre est une sorte de mage ou de saint […] Tout cela est imprécis, gauchement indiqué, ne signifie rien, semble équivoque. Il n’y a d’évident qu’une recherche d’harmonie chromatique, trouvée résumée dans les tons clairs, ton musical majeur.»