Au début du XIXe siècle, l’intérêt pour le gothique est le fait d’une poignée d’érudits et d’artistes dont l’enthousiasme va favoriser l’émergence de la notion de patrimoine.
Entamée en 1820, la publication des Voyages pittoresques et romantiques de Taylor et Nodier, recense les plus remarquables édifices de France et accorde une large place aux cathédrales. La sensibilisation des pouvoirs publics à leur sauvegarde permet la création en 1830 de la commission des monuments historiques. Prosper Mérimée, l’un de ses premiers inspecteurs, entend contrôler l’état des monuments mais aussi leur restauration.
Un vif débat accompagne en effet les premiers chantiers : un théoricien comme Ruskin conteste le principe même des restaurations, tandis que Viollet-le-Duc prône la reconstitution d’un état idéal, fondé sur l’étude historique du monument. Plusieurs grandes cathédrales médiévales deviennent alors des cathédrales du XIXe siècle : Notre Dame de Paris gagne ainsi en 1859 sa flèche monumentale.
A Rouen sont conduits deux chantiers colossaux où triomphe le néo-gothique : la façade de l’abbatiale St Ouen, achevée en 1851, et la flèche de la cathédrale. Pour remplacer celle que le feu a détruite en 1822, l’architecte Alavoine a recours à la fonte de fer. Cette technologie des plus modernes permet à Rouen de détenir en 1876 le plus haut édifice du monde, dépassé en 1880 par la cathédrale de Cologne.
Autre innovation technologique, la photographie est mise à profit par la « mission héliographique » créée en 1851. Cinq photographes (Baldus, Bayard, Le Gray, Mestral et Le Secq) sillonnent le territoire pour documenter les édifices importants. On leur doit les premières images de cathédrales, que Marville, Bacot ou les frères Bisson vont rapidement compléter.
D’autres procédés sont à l’œuvre pour fixer le souvenir d’un patrimoine en rapide dégradation : dessin d’observation, relevés, moulages. A travers ces diverses entreprises, se constitue une science et une conscience. L’art des cathédrales se révèle dans sa complexité et sa richesse, mais aussi dans sa fragilité.