« On écrira un jour l'histoire d'une curieuse maladie de notre temps, la manie du gothique. On en sait le premier et ridicule commencement. M. de Chateaubriand, au Val aux Loups, près Sceaux, hasarda de bonne heure une très-grotesque imitation. » Si l’historien Jules Michelet goûte peu l’intérieur gothique composé par l’auteur du Génie du Christianisme, il reste que la vogue du décor dit « à la cathédrale » est une période des plus créatives pour les ars décoratifs.
Les premiers exemples apparaissent dès les années 1800 dans les intérieurs français, telles les boiseries du cabinet de lecture de l’hôtel de Madame Vanlerberghe. Ce goût prend véritablement son essor sous la Restauration (1814-1830) comme en témoigne le cabinet gothique aménagé pour la comtesse d’Osmond vers 1817-1820. Sous un régime attaché aux valeurs du passé, le décor « à la cathédrale » permet par sa fantaisie singulière une vraie libération des formes.
Sous le règne de Charles X (1824-1830), la mode atteint son apogée : le style « à la cathédrale » se décline dans tous les objets du quotidien, du mobilier à la céramique, en passant par le papier peint, la verrerie, les bijoux, les reliures et les petits objets en bronze. Les pendules imitent les façades des cathédrales les plus célèbres, en jouant sur l’analogie du cadran avec une rosace.
Avec la monarchie de Juillet (1830-1848), le rapport au passé se fonde sur une approche plus scientifique, qui se ressent dans l’évolution du décor. L’ornement gothique n’est plus seulement plaqué sur des formes classiques, mais s’étend désormais à la structure. Le décor « à la cathédrale » cède la place à des restitutions archéologiques. Il aura fait néanmoins émerger un nouveau répertoire décoratif, dont le goût se propage à travers le XIXe siècle jusqu’aux Etats-Unis.